Thibaut Cuisset

C’est avec cette série que Thibaut Cuisset conclut ses Campagnes françaises, lors d’une commande de plusieurs espaces artistiques et la région de Dunkerque. Thibaut Cuisset prend l’eau comme « cheminement et fil conducteur d’une épopée flamande », ce qui lui permet d’approcher le pays en suivant les canaux d’irrigation et d’en étudier sa singularité. Comme il l’avait fait dans la Somme en suivant le fleuve de son embouchure à la baie, il longe les cours d’eau de l’arrière pays au littoral, ce qui lui permet d’observer les différents aspects de ce paysage, comme il l’écrit dans son projet : « la campagne avec les activités agricoles organisées à partir des polders, la ville et les zones de friction entre la ville et la campagne puis l’industrie ».

Cuisset traite également de la frontière, par sa matérialisation naturelle avec le canal d’Aa et par la modification du paysage qui se traduit notamment par l’architecture. Il longe le littoral de La Panne – frontière belge – jusqu’à Gravelines, afin d’approcher les dunes, un espace naturel orchestré et protégé par l’homme. Cette sérié est interrompue par le décès du photographe, alors qu’il lui restait un séjour – sur six – à réaliser et qu’il avait déjà sélectionné un certain nombre de photographies. À l’occasion de la préparation d’un ouvrage sur cette série qui n’a finalement pas pu voir le jour, Michel Poivert écrit un texte dans lequel il évoque lui aussi le regard de Thibaut Cuisset. Rédigé pour accompagner les photographies de cette campagne dans les Flandres occidentales françaises, ce passage fait plus largement écho aux Campagnes françaises de Cuisset :

« Lorsque l’on dit qu’un regard « embrasse » c’est qu’il prend et qu’il comprend. Paysager avec l’insistance de Thibault Cuisset revient à dépaysager comme on dévisage : le regard est toujours au défi. La précision de la prise de vue permet d’obtenir une sélection des matières et des couleurs. Chaque élément « organique » se détache : terre, blé, ciel, roche, brique, sable...la vue devient un tamis, le monde se répartit par strates et substances. Le point précis de la rencontre entre l’inventaire et le symphonique. » Michel Poivert